Visa pour l’image 2021

Perpignan

Dimanche 29 août 2021

Un Ouigo nous mène à Perpignan pour assister à Visa pour l’Image, c’est la 33e édition. En 2h50 on rallie Montpellier, il en faudra presque autant pour le tronçon Montpellier-Perpignan, mais on a le temps… Le programme des Rencontres d’Arles de cette année nous ayant paru assez « fumeux », on a zappé cette édition. Il faut dire que les dernières éditions nous avaient déçus, avec un parti-pris de faux esthétisme très académique, le même style de dérive qu’a connu Paris Photo…

Avec Visa pour l’Image, on sait à quoi s’attendre, c’est le constat de l’état de la planète qu’on prend en pleine poire, il vaut mieux ne pas être dépressif car d’année en année, cela ne s’améliore pas vraiment…  Avec le réchauffement climatique qui s’annonce et l’ONU qui prévoit des migrants climatiques par centaines de millions dans les décennies à venir, on trouvera a posteriori que ce début de XXIe siècle était bien « calme » ! On n’est pas masos (peut-être que si en fait…) mais c’est l’occasion de se rendre compte et de comprendre ce qui s’est passé vraiment car les media main-stream ont plus que tendance à survoler brièvement et de manière très superficielle « l’actualité » avant de vite passer à autre chose, un évènement chassant l’autre dans un zapping effréné…

On s’est pris un petit appart en plein cœur du Vieux Perpignan au 1er étage d’un charmant hôtel particulier du XVIIe, comme cela les déplacements seront minimisés pour Paulette qui a toujours quelques misères avec sa hanche même si son « rayon d’action » s’améliore petit à petit…

Lundi 30 août

On débute par la Chapelle du Tiers-Ordre où Angelo Tzortzinis expose ses photos du camp de Moria sur Lesbos, Les derniers jours du camp de Moria, à l’époque le plus grand camp de réfugiés d’Europe. Dans ce camp prévu pour accueillir 3 000 réfugiés, il y en avait plus de 20 000 qui s’y entassaient en septembre 2020 lorsqu’un incendie criminel le détruisit… On était passés devant « par hasard » en octobre 2016 lors d’une balade à Lesbos et cela nous avait fait tout drôle de tomber sur ce camp entouré de barbelés au milieu de nulle part, loin de tout… Les migrants qui en avaient plus qu’assez et ont probablement mis le feu au camp sont malheureusement tombés de Charybde en Scylla et ont passé l’hiver sous des tentes…

Nariman El-Mofty avec Fuir la guerre au Tigré,illustre la catastrophe humanitaire de ce conflit qui a brièvement fait la Une de l’actualité avant de retomber dans l’oubli, les médias se lassent vite… En quelques semaines, plus de 62 000 réfugiés se sont retrouvés dans des camps improvisés au Soudan.

Guillaume Herbaut avec La Ve illustre des aspects pas brillants de cette République au bord de l’asphyxie qui ne vieillit pas si bien que cela avec une concentration du pouvoir sans précédent, ballotée entre crise économique, société à deux vitesses, attaques terroristes, montée du populisme, gilets jaunes et le Covid 19 pour en remettre une couche… Un peu d’humour quand même avec les tulipes de Jeff Koons ou les poulets de la malbouffe…

Antoine Agoudjian,avec Arméniens, un peuple en danger s’est senti concerné par l’offensive turco-azerbaïdjanaise contre le Haut-Karabakh. L’on apprend au passage que le despote Erdogan n’a pas hésité à « recycler » des djihadistes transférés depuis la Syrie pour l’occasion, tout cela avec la complicité plus que trouble de la Russie ! Et La Turquie fait toujours partie de l’Otan, cherchez l’erreur…

Petit break nature avec Le secret des baleines, photos de Brian Skerry du National Geographic  illustrant les dernières découvertes scientifiques comme quoi les baleines ont des traditions et des structures sociales très évoluées qu’elles se transmettent de génération en génération. Assez étonnant !

On repart dans l’actualité avec Danish Siddiqui et ses photos concernant le Covid 19 en Inde, pas triste… Mais en Inde,  pas question d’annuler, même au pic de la pandémie, les grandes fêtes religieuses, ceci explique cela…

Reportage ensuite sur la révolte au Myanmar, le photographe local restant anonyme pour des raisons évidentes… Lorsqu’on connait le calme habituel des Birmans, on mesure mieux la colère qui les anime. Cela n’empêche pas Total de continuer à faire du business avec la junte.

Comme pour une fois l’on se trouve à Visa lors de la semaine « pro », il y a d’autres manifestations, c’est ainsi que l’on assiste au Palais des Congrès à divers reportages vidéos présentés par leurs auteurs. Comme l’explique l’un d’eux, le photo-reportage nourrit de moins en moins son homme, avec la généralisation des portables permettant aux médias d’acheter des photos au plus bas coût sans se préoccuper d’une qualité quelconque. De nombreux photo-reporters réalisent donc des reportages vidéo en complément pour arriver à faire bouillir la marmite…  Ce lundi, on voit entre autres un reportage d’Olivier Jobard Yémen : à marche forcée. Tout le monde a entendu parler des flux migratoires en direction de l’Europe, via la Méditerranée, avec la petite île de Lampedusa qui est devenue tristement  célèbre ou via les îles grecques bordant la côte Turque. Par contre, nous découvrons que le principal flux migratoire provenant d’Afrique n’est pas en direction de l’Europe mais de l’Arabie Saoudite et des Emirats, perçus – sans jeu de mots – comme la Mecque pour trouver  du boulot. Provenant d’Afrique centrale et du Sahel, la route migratoire passe par l’Ethiopie, Djibouti, traverse la mer Rouge pour rejoindre le Yémen et de là l’Arabie Saoudite ou les Emirats.

La traversée du désert du côté de Djibouti avec 45°C sans la moindre ombre sur des dizaines de kilomètres dans la caillasse (c’est montagneux !), ce n’est pas rien !

Mais le plus étonnant, c’est que les migrants qui débarquent au Yémen ne sont, pour la plupart, même pas au courant qu’ils débarquent dans un pays en guerre ! Ils se font racketter par les diverses factions et comme dit l’un d’eux, « j’aurais su, je ne serais pas venu ! ». Rares sont ceux qui arrivent vivants en Arabie Saoudite car les gardes-frontière n’hésitent pas à tirer à balles réelles, c’est bien connu, l’Arabie Saoudite est exemplaire côté Droits Humains…

Pour achever cette journée côté expos,  un « best-off » de 40 ans de photojournalisme d’Eric Bouvet à travers la planète, superbes photos mais je ne pense pas qu’on puisse s’en sortir indemne…

Après dîner, on rejoint le Campo Santo pour la soirée. Une projection vidéo sur écran géant retrace les évènements les plus marquants de septembre 2020 à août 2021. Chaque soir on a une chronologie avec deux mois de l’année écoulée, puis divers sujets liés aux faits de société ou aux conflits sont développés. A noter qu’il n’y a pas grand-monde cette année à Visa, on trouvera à chaque fois de la place sans problème, alors que d’habitude c’est  archi-comble, probablement une conséquence du Covid.

Quant aux photos du blog, leur choix est très subjectif, c’est un tout petit échantillon de ce que l’on peut voir sur place. Et encore, Visa étant un festival entièrement gratuit, leur budget ne leur permet pas d’investir dans des vitres anti-reflets, ce qui élimine nombre de photos que j’aurais bien aimé « sélectionner »…

Les photos sont ici.

2 réflexions sur “Visa pour l’image 2021

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